Loi Lagleize : devenir propriétaire du bâti sans le terrain ?

La proposition de loi Lagleize, déposée en 2019, a créé une vive polémique. L’une des propositions majeures de cette loi consiste à permettre aux citoyens de devenir propriétaires de la maison, sans nécessairement être propriétaires du terrain sur lequel elle repose.

Mais qu’est-ce que cela implique concrètement pour les futurs propriétaires ? Peut-on réellement être propriétaire du bâti sans posséder le sol ? Voici un décryptage complet.

Loi Lagleize

Contexte de la loi Lagleize : pourquoi une telle initiative ?

La loi Lagleize a été introduite dans un contexte où les prix de l’immobilier, notamment des terrains, connaissent des hausses vertigineuses. Entre 2009 et 2019, le prix des terrains a augmenté de 71 %, tandis que le coût de la construction a lui aussi progressé de 24 %. Face à ce phénomène, se loger dans certaines zones tendues devient de plus en plus difficile, et l’accession à la propriété semble inaccessible pour une grande majorité des Français.

La loi Lagleize, prolongement de la loi Alur de 2014, cherche à apporter une solution en réduisant les coûts liés à l’achat immobilier. Contrairement à ce que certains pourraient penser, cette loi ne remet pas en cause la possibilité de devenir propriétaire, mais elle modifie profondément le modèle traditionnel du droit de propriété en France.

Qui a voté la loi Lagleize ? Une proposition en cours de discussion

Le rapport Lagleize a été confié à Jean-Luc Lagleize, député du MoDem, qui a été chargé de réfléchir à des solutions pour maîtriser les prix du foncier. Son rapport a été remis au gouvernement en novembre 2019 et a débouché sur la création d’une proposition de loi. Cette proposition a été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le 28 novembre 2019. Cependant, les travaux au Sénat ont été interrompus en raison de la crise sanitaire du Covid-19.

À ce jour, la proposition de loi n’a pas encore été définitivement adoptée et n’a pas été promulguée. On parle donc de proposition de loi et non de loi en vigueur.

L'objectif de la loi Lagleize : rendre l'immobilier plus accessible

Le but de la loi Lagleize est simple : faciliter l’accès à la propriété pour un maximum de Français en réduisant les coûts d’achat des logements. L’un des principaux moyens d’atteindre cet objectif est de dissocier la propriété du foncier et celle du bâti.

Cette idée repose sur un dispositif déjà introduit par la loi Alur de 2014, qui a permis aux ménages modestes d’accéder à la propriété par le biais des Organismes de Foncier Solidaire (OFS) grâce à la création du bail réel solidaire (BRS), conditionné aux ressources des acquéreurs. La loi Lagleize va plus loin en permettant à des futurs propriétaires d’acheter uniquement la maison, tout en payant une redevance pour l’occupation du terrain. Cette mesure s’applique sans conditions de ressources.

Ainsi, la loi Lagleize introduit une nouvelle forme de propriété, différente du modèle classique, et crée un troisième type de droit de propriété, à savoir la possibilité d’être propriétaire du bâti sans posséder le terrain.

Que contient la loi Lagleize ? Une dissociation de la propriété du sol et du bâti

Le projet de loi prévoit un modèle concret qui repose sur un système de dissociation de la propriété. Concrètement, voici le fonctionnement :

  1. Acquisition du terrain par une collectivité locale : Une commune ou une autre collectivité locale achète un terrain et en devient propriétaire.

  2. Achat de la maison : Le futur acquéreur achète la maison construite sur ce terrain et en devient propriétaire, mais uniquement des murs. Le terrain, lui, reste sous la gestion de la collectivité locale.

  3. Versement d’une redevance : L’acquéreur devra payer une redevance symbolique à la commune (1 ou 2 euros par mètre carré) pour occuper le terrain. Un bail emphytéotique serait mis en place pour formaliser cette occupation.

Ce modèle rappelle celui des Organismes Fonciers Libres (OFL), qui permettrait aux collectivités de limiter l’impact des prix du foncier sur les projets immobiliers d’intérêt général.

Le principal avantage de ce modèle est la réduction des coûts pour l’acheteur. En effet, étant donné que les promoteurs immobiliers prennent généralement en compte le coût du terrain dans leurs prix, l’absence de propriété foncière permettrait une réduction de 30 à 50 % du prix d’achat d’un bien immobilier.

Implications pour les acheteurs : acheter sans terrain

Si la loi Lagleize est adoptée, cela signifie qu’il sera possible d’acheter un bien immobilier en étant propriétaire des murs mais pas du terrain. Les futurs propriétaires bénéficieront ainsi d’un prix d’achat inférieur à celui d’un achat classique, ce qui rend l’immobilier plus accessible, notamment dans des zones où le foncier est particulièrement cher.

L'achat d'une maison : suis-je propriétaire du terrain ?

Avec la loi Lagleize, l’acquéreur d’une maison pourra être propriétaire des murs sans être propriétaire du sol. Cependant, cela ne remet pas en cause le droit de propriété classique. Les propriétaires actuels continueront d’être propriétaires des terrains sur lesquels leurs maisons sont construites.

Il sera également possible de procéder à un achat en pleine propriété classique, comme cela se fait actuellement. La loi Lagleize propose une alternative à ceux qui cherchent à devenir propriétaires à moindre coût dans des zones où le foncier est particulièrement tendu.

Impact de la loi Lagleize sur les bureaux d’études structure

La dissociation entre le foncier et le bâti imposée par la loi Lagleize engendre de nouvelles problématiques pour les bureaux d’études structure. En effet, les ingénieurs devront repenser la conception des fondations et adapter leurs méthodes pour garantir la stabilité des ouvrages sur des terrains appartenant à des collectivités ou des OFL.

Dans ce cadre, plusieurs éléments devront être pris en compte :

  • L’adaptabilité des structures : Les bâtiments devront être conçus pour s’intégrer dans un cadre où le propriétaire du bâti n’est pas celui du sol, ce qui peut impliquer des règles spécifiques concernant l’occupation du terrain, les extensions ou les modifications futures.

  • Les contraintes réglementaires : Les communes et OFL pouvant fixer des exigences particulières sur les bâtiments construits sur leurs terrains, les bureaux d’études structure devront anticiper ces nouvelles contraintes pour proposer des solutions conformes.

  • La durabilité des ouvrages : Un bâtiment construit sur un terrain en bail emphytéotique doit pouvoir être démontable, réversible ou aisément transférable à un autre occupant à la fin du bail. Cela pousse les ingénieurs à envisager de nouvelles approches en matière de conception structurelle et d’utilisation des matériaux.

  • L’optimisation des coûts : L’un des objectifs de la loi étant de réduire les coûts de l’accession à la propriété, les BET devront proposer des solutions économiques tout en garantissant la sécurité et la longévité des bâtiments.

Ainsi, bien que la loi Lagleize vise avant tout à améliorer l’accès à la propriété, elle représente aussi un véritable défi technique pour les BET structure, qui devront adapter leurs pratiques à ces nouvelles formes de propriété.

Relayez cette information sur votre réseau favori.